Vénérable Maître en Chaire, Dignitaires et Vénérables Maîtres qui décorez l’Orient,

et vous tous mes Sœurs et mes Frères en vos Grades et Qualités.

 

Comme vous le savez certainement, la Respectable Loge Hatshepsout qui nous réunit chaque mois en ces locaux, fêtera son 27^e anniversaire en septembre prochain. Mais qui aujourd’hui se souvient de son histoire et de celle des rites qui ont présidés à son établissement ?

 

Le Rite de Misraïm que nous utilisons est né de la fusion de plusieurs Rites ésotériques et gnostiques du 18^e siècles. Il revendique une première filiation historique venant d’un Rite Primitif qui aurait été pratiqué en 1721. Cependant, il apparaît pour la première fois en Italie, dès 1738. 

 

Déjà à cette époque, Misraïm était un Rite maçonnique d’inspiration ésotérique, nourri de références alchimiques, occultistes et égyptiennes, avec une structure en 90 degrés. Contrairement aux autres rites maçonniques pratiqués à cette époque, il se revendiquait d’une tradition spirituelle antérieure à celle des trois théologies révélées incluses dans le catholicisme, le protestantisme et dans le judaïsme.

 

Tout au long de son histoire, le rite de Misraïm fut fréquentés par des maçons de Hauts Grades ayant le soucis de régénérer la théologie par la théurgie. Il réunissait essentiellement des maçons intéressés par le travail opératif de haute tenue (alchimie, théurgie, hermétisme astrologie), et rassembla de grands noms de Militaires, de penseurs, de philosophes et de scientifiques.

 

Les Statuts et Règlements Généraux du rite de Misraïm ainsi que le Tuileur auxquels  nous nous référons aujourd’hui, furent réédités en 1816 par Jean Marie RAGON.  Les rituels datés de 1820 qui nous ont été communiqués par ses Grands Conservateurs, sont tirés de très anciens manuscrits du Rite de Misraïm, dont ceux qui sont conservés à la bibliothèque d’Alençon.

 

Après deux siècles d’existence, Jules Osselin et Constant Chevillon, deux grandes figure de notre rite, pratiquaient encore le Rite Oriental de Misraïm avant la guerre de 1939 à 1945, dans sa Loge mère « l’Arc en Ciel ».

 

Suite au décret de dissolution de toutes les sociétés dites secrètes et maçonniques du 27 février 1941 signé par le Maréchal Pétain, les précieuses archives des Rites Confédérés de Misraïm, de Memphis, de Memphis-Misraïm et de quelques autres, furent confiées au Frère Robert Ambelain qui, durant toute la guerre les cacha dans sa cave.

 

Au décès du Grand Conservateur et Grand Maître Charles Henri Dupont le 1er octobre 1960, Robert Ambelain lui succéda à la Présidence des Rites confédérés.

 

En décembre 1995, suite à l’éclatement de La Grande Loge Française de Memphis-Misraïm et à l’éviction de son Grand Maître ad-vitam Gérard Kloppel par les membres de son Grand Conseil, un grand nombre de Frères désireux de continuer à utiliser le Rite Ancien et Primitif de Memphis-Misraïm, bien que n’en possédant plus la patente, s’étaient regroupés pour en obtenir une nouvelle de son Précédent détenteur Robert Ambelain.

 

Pour mémoire, une Patente est un écrit public, une sorte de franchise émanant d’une quelconque autorité. Par exemple, des magasins portant la même enseigne, ou des Loges affiliées à la GLISRU qui, propriétaire de son nom enregistré en préfecture, s’est fait reconnaître par d’autres Grandes Loges maçonniques, et permet, sous condition d’assujettissement, d’utiliser son titre comme gage de régularité.

 

Concernant le Rite Ancien et Primitif  de Memphis-Misraïm, Robert Ambelain en sa qualité Grand Conservateur s’en était dépossédé au profit de son ex-Substitut Grand-Maître Gérard Kloppel. Il ne pouvait donc céder ce qu’il ne possédait plus.

 

Afin d’éviter tout conflit entre les différentes obédiences nouvellement fondées par les anciens dignitaires de la Grande Loge Française de Memphis-Misraïm, Robert Ambelain proposa à trois Illustres Frères, membres de son Suprême Conseil, de réveiller le Rite Oriental de Misraïm qu’il avait hérité de Jean Bricaud le 1^er octobre 1960 lors de sa passation de pouvoir à la présidence du Suprême Conseil des Rites Confédérés.

 

En février 1996, sous l’autorité de la Grande Loge Française de Misraïm en devenir, quatre Loges furent autorisées à se créer sur Paris et Conflans Saint Honorine sous patente provisoire du Rite Oriental de Misraïm délivrée par Robert Ambelain. La plupart de leurs membres étant issus du RAPMM et n’étant pas encore familiarisés avec le rite Oriental de Misraïm, il leur fut donc accordé un temps d’adaptation, sous réserve, à terme, de le pratiquer régulièrement.

 

Le 3 avril 1996 les Trois Illustres Frères ex-membre du Suprême Conseil de la Grande Loge Française de Memphis-Misraîm, furent élevés au 90^e et dernier degré du rite pour former un Grand Conseil du rite Oriental de Misraïm et fonder la Grande Loge Française de Misraïm (Jean Marc FONT, Robert MINGAM, André JACQUES).

 

Au décès du Très Illustre et Très regretté Frère Robert Ambelain, le 27 mai 1997 à l’âge de 89 ans, sa succession avait été assurée par décret et transmission des archives du rite,  à ses Grands Conservateurs.

 

Lors de son second convent, en Juin 1998, après une année d’intenses travaux effectués par les Sœurs et les Frères de la Grande Loge Française de Misraïm pour aménager leur siège social, eut lieu la consécration des temples de la rue Cugnot dont celui où nous nous trouvons aujourd’hui. A l’ordre du jour était programmée l’installation prochaine de deux Respectables Loges, dont celle d’Hatshepsout à l’Orient de Paris, avec délivrance d’une patente anticipant leurs fondations.

 

 

Recto de la Patente originale du 29 juin 1998 établie par les deux Grands Conservateurs du rite, André JACQUES et Robert MINGAM

 

Verso de la Patente originale

 

Initialement, notre atelier était censé y être installé le premier lundi de septembre, par les Grands Officiers du Conseil National, en présence des Souverains Grands Conservateurs 90^e et dernier degrés du Rite Oriental de Misraïm, signataires de la patente.

 

Pour des raisons d’éthiques personnelles, quelques Frères aujourd’hui disparus ou disséminés dans d’autres obédiences, conduits par le Frère Philippe Vinet décidèrent d’opérer une scission avec la Grande Loge Française de Misraïm en tentant de créer une seconde obédience du rite Oriental de Misraïm sous l’appellation de OAROM (Ordre Ancien du Rite Oriental de Misraîm).

 

Désolidarisée de la Grande Loge Française de Misraïm, Hatshepsout s’est alors installée dans un petit temple situé dans une cave de la rue Truffaut à Paris, pour y travailler au Rite Oriental de Misraîm, conformément à ses statuts et Règlements Généraux datant de 1820. Cependant, sa consécration, qui avait été initialement programmée par la Grande Loge Française de Misraïm fut organisée en Loge Souveraine sous le contrôle et l’autorité administrative de l’un des cosignataires de la patente précédemment établie (Robert MINGAM).

 

Depuis 27 années, sous son titre distinctif et sa référence au Rite Oriental de Misraïm, Hatshepsout a toujours conservé l’option de pratiquer le Rite Ancien et Primitif de Memphis Misraïm Restauré par Robert Ambelain.

 

Lorsqu’en 2003 les Sœurs et les Frères d’Hatshepsout ont choisi de s’affilier à la Grande Loge Indépendante et Souveraine des Rites Unis, l’obédience a procédé aux enquêtes préalables concernant la validité des diplômes de ses membres, les origines incontestables de sa Patente et de ses filiations justifiant du choix des rituels utilisés. C’est pour cette raison que la Patente qui fut délivrée à la Loge par la GLISRU porte bien la référence au rite Oriental de Misraïm.

 

Hatshepsout avait pu se faire affilier à la GLISRU en sa qualité de Loge du rite égyptien, du fait que cette obédience était déjà étroitement associée au CIRE (Conseil Inter obédientiel des Rites Egyptiens), et au SCEPA (Suprême Conseil pour l’Europe et les Pays Associés), lui-même souché sur le Souverain sanctuaire de l’Ordre Traditionnel de l’Océan Indien (OMT).

 

Nota : l’OMT, créé en septembre 1998, fondé officiellement le 28 septembre 2001 par le Frère Joseph TSANG MAN KIN sous l’autorité du Grand Maître CHEICKNA SYLLA, successeur de Gérard KLOPPEL, Grand Maître du Rite Ancien et Primitif de Memphis-Misraïm.

 

En date du 13 septembre 2013, le Rite Oriental de Misraïm s’est associé au Souverain Sanctuaire des Gaules des Sublimes Ordres Universels d’Egypte (SSGSOUE). Mais indépendamment des autres rites qui composent ce Souverain Sanctuaire, ses Grands Conservateurs, 90^e et dernier degrés du Rite, membres actifs de son Grand Conseil, sont tous détenteur d’une patente régulière leur accordant conjointement pouvoir et autorité pleine et entière concernant la gestion du Rite Oriental de Misraïm, au travers de ses Chambres de direction, du premier au 90^e degré inclus, en toute indépendance, Souveraineté et Liberté, en conformité avec les Règlements et Constitutions de l’Ordre de Misraïm.

 

Cependant, par décrets magistraux des 17 octobre 2004 et 15 décembre 2013, le Souverain Sanctuaire des Gaules et des Sublimes Ordres Universels d’Egypte a délégué ses pouvoirs administratifs et judiciaires à la GLISRU, pour tout ce qui concerne la surveillance de ses Loges symboliques du Premier au Troisième degré.

En conséquence, aujourd’hui notre Loge travaille bien sous l’autorité administrative de la GLISRU, mais elle pratique un rite dont elle ne détient aucune patente légale.

 

Pourtant, depuis 24 ans, la Patente du Rite Oriental de Misraïm qui lui avait été concédée, sous réserve d’en respecter l’usage, est toujours à sa disposition. Il convient donc pour la Loge de décider de son rétablissement, afin qu’elle figure à nouveau sur les marches de l’Orient.

 

A la différence de la patente qui nous fut délivrée par la GLISRU, qui atteste de notre soumission administrative à cette obédience, celle de Misraïm rappelle notre engagement à perpétuer ce rite séculaire en toute indépendance, dans le respect de ses règles établies par ses Grandes Constitutions.

 

Notre très regretté Frère Robert Ambelain se plaisait à rappeler que « ce qui confirme l’authenticité d’un document, n’est pas seulement d’en connaître l’origine, mais plutôt d’en apprécier l’influence ».

 

Il poursuivait en disant que : « Ce qui est intéressant aujourd’hui comme hier, n’est pas tant de savoir qui a écrit les rites maçonniques, mais surtout de savoir qui les applique ».

 

Quel que soit le rite utilisé, c’est dans la pratique de ses rituels que la Franc-maçonnerie transmet ses valeurs. Sur ce grand arbre de vie qui symbolise nos traditions, dont les racines s’enfoncent dans la nuit des temps,  tous se nourrissent de la même sève. Par ses lointaines origines égyptiennes, le rite Oriental de Misraïm, est comparable à l’une de ses basses branches sur laquelle se sont greffés et développés d’autres rites inspirés de ses fondamentaux.

 

Ainsi, le rétablissement de l’usage du rite Oriental de Misraïm, serait en quelque sorte, se rapprocher au plus près de la tradition primordiale.  

 

J’ai dit, Vénérable Maître

 

Robert MINGAM

Le 5 avril 2025